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L’Épopée cathare

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L’Épopée cathare
Michel Roquebert

Quatrième(s) de couverture

L’invasion 1198-1212

Il y a près de huit siècles, à l’instigation du pape innocent III, le fer et le feu s’abattaient sur les terres qui allaient constituer plus tard la province du Languedoc. Ce premier volume raconte le prétexte de cette guerre sans merci connue sous le nom de croisade albigeoise et menée par une chevalerie recrutée dans le nord de la France : l’éradication du catharisme, une hérésie solidement implantée en pays occitan, qui enseignait que le monde visible n’est pas l’œuvre du Dieu de bonté, mais celle d’un créateur mauvais.

Muret ou la dépossession 1213-1216

En 1213, la bataille de Muret consacre la victoire du Nord sur le Sud-Ouest, des croisés commandés par Simon de Montfort sur le comte de Toulouse et le roi d’Aragon, de Rome sur les cathares.
L’épée a provisoirement vaincu la parole. Tournant capital de cette première croisade contre les Albigeois, Muret inaugure le démembrement de la puissance cathare.

Le lys et la croix 1216-1229

Lorsqu’en avril 1216 Simon de Montfort fait hommage de ses conquêtes au roi Philippe Auguste, la croisade contre les cathares semble achevée. En fait, c’est le début d’une nouvelle lutte entre la légalité du « seigneur postiche » installé par la force, et la légitimité du « comte naturel » Raymond VI de Toulouse, alors en fuite. Massacres, bûchers, batailles n’ont pas résolu la question cathare : l’autorité du roi de France sur Toulouse, l’autorité religieuse de Rome sur les pays « hérétiques ». Ce tome raconte le rétablissement inespéré opéré par les Occitans sous la bannière de Raymond VII mais aussi la « croisade royale » qui finit par sanctionner irrémédiablement sa défaite, et prépara l’annexion du Languedoc au domaine capétien.

Mourir à Montségur 1230-1244

750 ans après les événements, Montségur parle encore à notre imaginaire. La légende et l’histoire ont entremêlé leurs fils ; une poignée d’« hérétiques » qui défient des années durant les deux plus grandes puissances de leur temps, l’Église romaine et le roi de France ; dix mois d’un siège en altitude qui s’acheva un matin de mars 1244, dans les cendres d’un immense bûcher collectif ; les dossiers de l’Inquisition conservant les données d’un combat dont la question centrale reste toujours d’actualité : comment le mal peut-il apparaître dans un monde créé par un Dieu en principe infiniment bon ? La réponse cathare était fascinante, mais aussi redoutable pour les rois de France que pour Rome. C’est l’histoire d’une geste pathétique et folle, ici magistralement racontée en se fondant uniquement sur les sources du temps.

La fin des Amis de Dieu 1244-1321

Le catharisme n’est pas mort en 1244 sur le bûcher de Montségur. Dans le dernier volume de sa magistrale série, Michel Roquebert est le premier à relater, grâce à l’étude de milliers de sources contemporaines, la résistance du catharisme jusqu’au bûcher du dernier cathare, guillaume Bélibaste, en 1321.
L’auteur décortique le travail de l’Inquisition, fondé sur le contrôle d’un pays entier et la mise en fiches, village par village, de toute sa population. À la lecture de cette chasse aux « Amis de Dieu », comme s’appelaient entre-eux les cathares, c’est la première guerre idéologique totalitaire qu’on découvre.

René Nelli

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René Nelli

Biographie

Né le 20 février 1906 à Carcassonne et mort le 11 mars 1982 à Carcassonne, inhumé au cimetière de Saint-Vincent dans cette même ville, est un poète occitan, philosophe et historien du catharisme.

Docteur ès lettres, professeur de lettres et de philosophie.
Professeur d’ethnographie méridionale à la faculté des lettres de l’Université de Toulouse.
Poète, essayiste, hermétiste, René Nelli est surtout connu pour ses travaux sur la culture occitane et sur le catharisme.

René Nelli aimait à dire qu’il était descendant d’une famille de sculpteurs florentins installés dans l’Aude au XVIe siècle.
Dans les années 1928-1930, et jusqu’en 1950, René Nelli a été très lié avec le poète Joë Bousquet et a pris à ses côtés une part active à l’élaboration du « surréalisme méditerranéen ».
Il a participé très activement à la revue d’ethnologie méridionale Folklore, fondée par Fernand Cros-Mayrevieille, et a joué un rôle important en ce qui concerne la connaissance de la culture occitane, notamment en participant à la fondation avec Jean Cassou en 1945, à Toulouse, de l’Institut d’études occitanes.
Il fut également le fondateur du Centre d’études cathares en 1981 qui prit son nom un an plus tard, à sa mort.
C’est au contact de Déodat Roché qu’il s’initia au catharisme.
Source : Wikipedia

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La vie quotidienne des cathares du Languedoc au XIIIe siècle

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La vie quotidienne des cathares du Languedoc au XIIIe siècle
René Nelli

Quatrième de couverture

Le catharisme s’inscrit dans le mouvement de rénovation évangélique qui s’est manifesté dans toute la Chrétienté aux XIIe et XIIIe siècles. L’Inquisition comme les chevaliers du roi de France l’ont combattu par la parole et par les armes. Doctrine hérétique, il professait l’existence de deux principes antagonistes, inégaux en valeur, mais également éternels, et défendait l’idée que le monde était l’oeuvre du Diable. Voilà, sans aucun doute, ce qui a marqué le plus nettement les mentalités et les comportements de Occitans du XIIIe siècle. Il en résulte que la vie quotidienne des cathares fut loin de coïncider avec celle de l' »homme quelconque » du Moyen Age. René Nelli propose dans ce livre une sorte de livre une sorte de film de la vie des cathares languedociens de 1200 à 1350, dans les comtés de Toulouse et de Foix et dans les quatre vicomtés de Trencavel (Carcassonne, Béziers, Albi et Nîmes). En effet, c’est dans ces régions, qui furent le principal théâtre de la fameuse « Croisade contre les Albigeois », que l’on saisit le mieux dans leur continuité historique l’existence, le déclin et la tragédie du catharisme.
René Nelli Originaire de Carcassonne, docteur ès lettres, René Nelli a dirigé la revue d’ethnologie méridionale Folklore. Il prit une part importante à la restauration de la civilisation occitane en fondant en 1946, à Toulouse, avec Jean Cassou, Tristan Tzara, Ismaël Girard et Max Rouquette, l’Institut d’études occitanes. Par son oeuvre abondante et diverse, René Nelli, à la fois hermétiste, philosophe et poète, fut sûrement l’un des personnages mystérieux de notre temps.

Yves Maris

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Yves Maris

Biographie

Docteur en philosophie de l’Université de Toulouse II
Diplômé de l’École Supérieure de Commerce de Toulouse
Diplômé du Centre de Perfectionnement aux Affaires du Grand Sud-Ouest
Maire de la Commune de Roquefixade de 1983 à 2009.

Né le 8 mai 1950, Yves Maris, issu d’une famille d’industriels du textile, avait fait sa carrière comme administrateur judiciaire et syndic de sociétés en liquidation.
À son retour du service militaire, il fréquente l’Hestia (la maison) de Fanita de Pierrefeu à Montségur et l’univers aussi étrange que cosmopolite qui y gravitait. C’est là qu’il découvre la pensée des cathares.
Ne se satisfaisant désormais plus de sa voie professionnelle, il l’abandonne pour des études supérieures de philosophie, puis empreint de l’esprit et de la spiritualité cathares, il décide de vivre à leur image dans maison, la Bastida dels cathars.
Cela ne l’empêchera pas de conserver un goût pour la vie publique, puisque élu du village de Roquefixade, il fera même une petite incursion sans lendemain vers les élections législatives.Read more

L’Inquisition en Quercy

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L’Inquisition en Quercy
Jean Duvernoy

Le registre des pénitences de Pierre Cellan 1241 – 1242

Quatrième de couverture
L’inquisiteur Pierre Cellan est venu en Quercy entre 1241 et 1242 et nous a laissé ce registre de pénitences où l’on trouve cités bien des lieux du Quercy (Moissac, Gourdon, Casteinau-Montratier, Montcuq, Lauzerte, Cahors, Montpezat, Montauban, Sauveterre), de nombreux villages et hameaux existant encore de nos jours, et beaucoup de noms de famille.
C’est une source historique précieuse pour le Quercy, enfin mise à la disposition du public.
Introduit, traduit et annoté par l’un des plus grands spécialistes des textes d’Inquisition, cet ouvrage essentiel vient combler un manque évident. L’introduction re-situe le texte dans son contexte historique et le complète. Outil de recherche, ce document est aussi le moyen de découvrir à quel point, malgré une légende tenace, le Quercy a connu la prédication des chrétiens cathares.

Le dossier Montségur

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Le dossier Montségur
Jean Duvernoy

Quatrième de couverture
Plusieurs chroniques font allusion à la reddition de la forteresse de Montségur et au bûcher qui l’a suivi. Mais l’essentiel de l’histoire du château, de son utilisation comme siège de l’église cathare et de sa fin tragique est contenu dans les interrogatoires de l’inquisiteur Ferrer, et à titre épisodique, de ses successeurs.

Le Dossier de Montségur emprunte au registre les dépositions des rescapés de Montségur, qui vont du 10 mars au 19 mai 1244. Celles-ci sont suivies de dépositions intéressant pour partie Montségur, faites par les habitants de Mirepoix ou du Lauragais, puis de dépositions empruntées à des registres postérieurs : registre de Bernard de Caux et de Jean de Saint Pierre (1245-1246) pour le Lauragais, registre des mêmes pour le pays de Foix, registre de Pons de Parnac et autres (1273-1278).

Si le lieu et les circonstances du bûcher sont bien établis, rien ne nous renseigne explicitement sur le lieu des interrogatoires. Mais tout porte à penser que les premiers se déroulèrent à Montségur. L’enquête suit un ordre immuable, que traduit le procès-verbal notarié, et que reprendra la sentence. L’intérêt principal de l’inquisiteur est de recueillir des dénonciations. Il s’agit de faire dire aux témoins qui a « vu » des parfaits et surtout les a « adorés ». Puis on leur fera dire qui a été « consolé », et enfin qui a participé à la défense du château rebelle et à l’expédition d’Avignonet.
Dans l’ensemble, on a une image très complète de la garnison.

Tel qu’il nous est parvenu, ce document nous livre une tranche d’histoire originale précise et parfois pathétique.

Le catharisme. L’histoire des cathares

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Le catharisme
L’histoire des cathares (tome 2)
Jean Duvernoy

Quatrième de couverture
Depuis de longues années, le catharisme suscite un vif intérêt tant en France qu’en de nombreux autres pays.
C’est à l’étude approfondie de cet univers religieux et culturel que s’attache Jean Duvernoy.
Avec un esprit de synthèse, il nous présente dans cet ouvrage l’histoire des différentes Eglises qui, de l’Asie Mineure à l’Angleterre en passant par l’Occitanie, ont pendant plusieurs siècles confessé et pratiqué cette religion.

L’étude de Jean Duvernoy se limite à la vie interne de ces communautés en laissant délibérément de côté l’histoire de l’Inquisition, de la répression, des événements diplomatiques et militaires. Ainsi une information minutieuse, appuyée sur l’état le plus récent des recherches historiques permet de suivre l’épanouissement et les épreuves de la foi médiévale dont l’attrait est fortement ressenti par notre époque moderne.Read more

La spiritualité du Moyen Âge occidental

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La spiritualité du Moyen Âge occidental (VIIIe-XIIe siècles)

André Vauchez

Quatrième de couverture
On a longtemps considéré le Moyen Âge comme l’âge d’or du christianisme. Aujourd’hui en revanche, on assiste à une remise en question du legs religieux de cette époque et en particulier de sa spiritualité, à laquelle on reproche d’avoir trop prôné la fuite et le mépris du monde. Pour éclairer ce débat, l’auteur s’est attaché à définir le contenu de l’expérience religieuse des hommes de ce temps. Sa recherche s’appuie sur leurs écrits mais aussi sur les conclusions que l’on peut tirer de l’étude des dévotions et de toutes les expressions de la foi, depuis le culte des reliques jusqu’aux sommets de la mystique. D’autre part, soucieux de mettre en lumière l’impact des transformations sociales et culturelles sur les représentations du divin et les formes de vie religieuse, il a cherché à dégager les principales étapes du processus qui a fait passer la chrétienté occidentale de la piété ritualiste et conformiste de l’époque carolingienne à une spiritualité évangélique, axée sur l’humanité de Dieu.
Agrégé d’histoire, ancien élève de l’École Normale Supérieure et de l’École française de Rome, André Vauchez est actuellement (1975 NDLR) directeur des études médiévales à l’École française de Rome.

Table des matières

Introduction
Chapitre Premier. — Genèse de la spiritualité médiévale (VIIIe siècle-début du Xe)

  1. Retour à l’Ancien Testament
  2. Une civilisation de la liturgie
  3. Le moralisme carolingien
  4. Religiosité populaire et spiritualité chrétienne….

Chapitre  II.   —  L’âge  monastique  et féodal   (fin   Xe-XIe siècle)   

    1. La spiritualité monastique
      • Prière et liturgie : l’exemple de Cluny
      • Vie angélique et mépris du monde
    2. L’influence de la spiritualité monastique
      • Vie profane et vie religieuse
      • Le combat spirituel
      • Dieu présent dans l’histoire
    3. De la réforme à la croisade : vers une spiritualité de l’action

Chapitre III.La religion des temps nouveaux (fin XIe-début XIIIe siècle)  

  1. Nouvelles conditions de la vie spirituelle
  2. Le retour aux sources : vie apostolique et vie évangélique
  3. Les transformations de la vie religieuse
    • L’érémitisme
    • La vie canoniale
    • Le nouveau monachisme
  4. Les laïcs en quête d’une spiritualité
    • Emergence du peuple chrétien : croisades, mouvements évangéliques, hérésies
    • Les laïcs dans la vie religieuse

Chapitre IV.L’homme médiéval à la recherche de Dieu. Formes et contenu de l’expérience religieuse

  1. Pèlerinage, culte des reliques et miracles
  2. Art  et   spiritualité
  3. Une conquête : la vie intérieure
  4. Aux origines de la mystique occidentale

Conclusion

Bibliographie

Le phénomène cathare

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Le phénomène cathare – René Nelli

Quatrième de couverture

Dans la pierre qui monte, toujours une
avec le rocher que je contemple,
s‘arc-boutant, transpercés
de tous les rayons de la lumière, les contreforts
des vieux châteaux d’Aquitaine et
d’ailleurs, en arrière-plan
desquels, celui de Montségur, qui brûle toujours…

André Breton

Dans « Le phénomène cathare », René Nelli essaie de reconstituer l’essentiel de cette philosophie hétérodoxe, en profondeur, «généreusement», au lieu de s’en tenir à l’interprétation « au pied de la lettre » qui, en bien des cas, équivaut à une trahison. C’est un précis de la pensée cathare qu’il nous livre ici, solidement appuyé, certes, sur les sources, mais éclairé aussi par tout ce qui peut se déduire légitimement des témoignages, de sorte que son étude se situe à mi-chemin entre l’histoire des mentalités et lhistoire de la philosophie. Cette première partie est complétée par deux courts essais consacrés à l’examen des problèmes moraux du catharisme.

On trouvera, en outre, dans « Le phénomène cathare », un certain nombre de textes mystiques, légendaires, poétiques, qui tendent à rendre imaginable l’atmosphère spirituelle dans laquelle s’est constituée la doctrine dualiste et le climat religieux dans lequel croyants et Parfaits ont vécu. Plusieurs de ces écrits n’avaient jamais été traduits en français.

Le livre se termine par une recension complète des vestiges archéologiques du catharisme occitanien. Si René Nelli ne les tient pas tous pour authentiques, du moins il les examine et les passe tous en revue, fournissant ainsi aux spécialistes des points de départ solides pour leurs propres investigations.

Sans prétendre épuiser son sujet qui est immense, «Le phénomène cathare» s’attache à faire le bilan des connaissances actuelles, à proposer quelques interprétations nouvelles, à suggérer des directives de recherches inattendues et fécondes.

Commentaire de Déodat Roché

L’auteur, dans son Avant-propos, nous dit sa résolution « d’aborder les traités dogmatiques du catharisme avec un esprit critique certes, mais aussi avec la volonté de le saisir philosophiquement… Cependant il y a un arrière-plan et des perspectives qu’il faut essayer de restituer », Nous retenons la critique faite aux érudits d’en rester a la lettre et de s’en tenir à son sens immédiat. Mais comment l’auteur, dans son interprétation philosophique va-l-il développer « d’une idée un d’une théorie, les conséquences qui s’en déduisent nécessairement, qui y sont contenues, bien qu’elles ne soient pas toujours formulées ».
Passons sur la liberté qu’il nous laisse de ne voir dans les « méditations personnelles » qu’il nous présente, « qu’une sorte  de  rêverie  littéraire, sans  rapport  avec  ce que  doit être la véritable activité scientifique ».
Quand Nelli nous dit que les principes de la métaphysique « se retrouvent toujours à peu près identiques de siècle en siècle », il méconnaît l’évolution qui est allée des vues concrètes de Platon — qui avait, lui, une expérience authentique de la « vie spirituelle », — aux conceptions abstraites des philosophes modernes qu’il cite, comme Sartre et Heidegger, Il est surprenant qu’il ne voie pas la différence nette qu’il y a entre les notions concrètes de nlhll (néant) et du mélange (d’être et de néant), telles que les concevaient les cathares, et l’idée abstraite que s’en font des philosophes qui ne paraissent avoir aucune connaissance spirituelle, ni avoir à plus forte raison, fait aucune expérience qui dépasse l’intellectualité moderne. (Notons en passant que les cathares admettaient l’égalité des femmes et des hommes et que la nécessité de devenir homme pour être sauvé s’entendait de l’homme intégral qui réunirait en lui toutes les forces masculines et féminines dans la perfection des corps de lumière). Le professeur Puech a vu l’explication des paroles de Bélibaste en ce sens dans l’Évangile gnostique de Thomas, (On peut lire à ce sujet les Cahiers d’Études cathares de 1960, 2e série, N° 5) sur l’Évangile selon Thomas ou les Paroles de Jésus.

Méditation sur la philosophie du catharisme

Nous trouvons au sujet du dualisme, et de Dieu et le principe du mal un intéressant exposé Mais d’abord, pourquoi continuer à parler de dualistes mitigés et de dualistes absolus, alors qu’on connaît les appellations dont usaient les cathares eux-mêmes de concorrèzlens et d’albanais venus de Bulgarie et d’Albanie. Cette observation est nécessaire. Il ne s’agit pas d’une seule question de mots : le terme d’absolu ne peut valoir que pour le Dieu suprême, inconnaissable et non pour sa manifestation par le Christ dans le monde où tout est relatif, le mal comme le bien. Nelli lui-même rappelle que pour ceux que nous appelons les « concorrèziens » le mal se manifeste d’une manière concrète par le monstre du chaos et qu’il apparaît pour les albanais comme une force de résistance au bien.
Nelli rappelle que dans un monde créé de rien par Dieu, il peut y avoir place, « selon Descartes », pour des contradictions relatives et, par conséquent, pour le mal « relatif ». Mais il ne peut s’agir que du Dieu absolu qui renferme en lui tous les contraires et non de sa manifestation dans le monde. Nous reviendrons à cette distinction essentielle du Dieu absolu (le Père) et du Fils émané de lui.
Remarquons en attendant qu’à défaut de cette distinction l’auteur s’engage dans une confusion singulière, il écrit des cathares albanais — qu’il dénomme toujours comme absolus — : « la liberté laissée à Dieu d’entretenir, en vue d’une action providentielle à longue échéance, des contradictions relatives, devait leur apparaître comme une Impossibilité radicale ». Or, au sujet de la théorie de la création, il relève bien que par un troisième mode de création, c’est-à-dire d’organisation d’une substance préexistante, « permission est accordée au mauvais principe et a ses ministres les anges mauvais, d’exercer une contrainte temporaire sur les âmes ».

« Dieu le fait quand, à cause de nos péchés, il ne veut pas l’empêcher » et par conséquent pour « une cause rationnelle ». (Livre des deux principes : chapitre sur la Création).
Quant à ce principe du mal qu’il distingue exactement du diable et de son père Satan, l’Auteur soutient qu’il est la négation elle-même, le néant lui-même, Or, cette assimilation du mal au néant, du mal au non-être absolu, n’a jamais été dans la pensée des platoniciens gnostiques, des manichéens et des cathares ainsi que nous l’avons démontré par notre étude du recueil des Éditions de Delphes sur « les cathares ». Le non-être pour Platon n’est pas le néant absolu, il est la matière primordiale, la nature primitive agitée par des forces qui la secouent irrégulièrement. C’est quand l’Esprit divin l’a organisée, mise en orde par le Cosmos, que l’on considère le résidu comme désordonné et sans Dieu. C’est de lui que vient le mal du monde qui pénètre tous les êlres vivants et engendre le mal moral chez l’homme.
Plutarque commente et précise. Les deux principes opposés, l’Esprit et la matière considérés d’abord comme malléables sont solidaires. « Il n’y a pas de réalisation sans le mélange, la combinaison, de ces deux principes opposés ». Il distingue l’âme désordonnée du chaos et « l’âme ordonnée du monde actuel ». La première existait avant la création, avant l’organisation du monde. Ces forces donnaient des mouvements incohérents à des éléments chaotiques. La seconde est l’âme cosmique. Dès lors, « Le principe du bien, c’est l’Esprit, le principe du mal. c’est l’âme du chaos », terme plus exact que celui de matière neutre. Des forces (dynameis) sont à l’origine du mal par leur résistance et leur rébellion.
Les gnostiques Valentiniens admettaient aussi une substance préexistante et coexistante à Dieu-Esprit (distinct du Dieu absolu, l’Un suprême), et d’après eux, l’âme qui donne les premiers mouvements désordonnés et les premières formes des éléments est « caractérisée ultérieurement comme mauvaise par sa résistance à l’Ordre». Elle est alors le Diable.
Plotin a précisé que la matière sensible n’est pas le néant absolu, mais le dernier degré de l’être. Dans ce monde fait d’un mélange d’intelligence et de nécessité le mal vient, comme l’a dit Platon, de la « nature ancienne » (la matière non ordonnée). Il est le dernier Principe, celui des ténèbres, opposé au premier Principe, celui de la lumière qui est le Bien. ( Ennéades 1-8, 3 et 6).
La Pistis Sophia gnostique nous parle aussi du chaos primitif, de l’organisation du monde, du Père, du Christ et du gouverneur du monde céleste qui deviendra par sa révolte « le Grand Arrogant ». mais il faut arriver a Manès pour trouver non seulement l’opposition de la Lumière et des Ténèbres, soit celle de deux substances toutes deux animées et vivantes, mais aussi le dépassement philosophique platonicien de ce concept pratique et populaire, Une distinction radicale, comme celle des deux arbres du bien et du mal et de leurs deux racines, est cependant relative et pas absolue. Nous savons par le philosophe Alexandre de Lycopolis que, selon Manès, les entités spirituelles, les forces (dynameis) qui agissent dans le monde, causent, les unes des mouvements désordonnés qui apparaissent comme matière chaotique, ténébreuse et sont la racine de tous les maux, les autres, des mouvements ordonnés, et sont la racine du bien. Le mal a ainsi une activité réelle, il est positif comme le bien, il n’est pas une simpie privation qui ne serait qu’imperfection de l’être.

Nous arrivons aux cathares que l’on considère avec raison comme des néo-manichéens. Il est normal de rechercher le sens des termes dont ils vont se servir et particulièrement celui de nihil (néant) dans la philosophie platonicienne des manichéens, essentiellement concrète, plutôt que chez des philosophes abstraits comme Heidegger. Nelli nous dit que les traités cathares évitent de définir le mal et nous voyons bien qu’ils le caractérisent pat ses effets. Les entités mauvaises et particulièrement celle de Satan, qu’on appelle le « mauvais Dieu » sont des êtres. La puissance de Satan est de son être et c’est l’inspiration du mal, l’orgueil, qui l’a fait dévier et l’a amoindri comme un moindre être En affirmant que le principe du mal est le néant lui même, le néant absolu, Nelli va donner au néant absolu, une existence qu’il déclare lui-même incompréhensible (page 42). Or le dominicain G. de Bergame disait bien que selon les cathares « le Diable a créé hylè ou premier ordre du monde, matière que nous retrouvons ici comme créée et que Plalon désigne comme l’âme élémentaire, les vertus (dynameis) dont les mouvements désordonnés apparaissent comme matière ». (Summa contra cathares. Dollinger I, page 374). Cette âme diabolique est considérée comme mauvaise parce qu’elle fait obstacle à l’évolution normale vers le bien.

M. Nelli est mal venu d’interpréter à la manière de Heidegger, comme néant absolu, l’expression de nihil, du Traité anonyme du XIIIe siècle (dont nous avons publié la traduction de M. Duvernoy dans nos Cahiers IIe série, N » 13 de 1962 : C’est sans Dieu que le néant a été fait). La traduction occitane cathare de l’Évangile de Jean 1. 3 disait déjà de Dieu : « Toutes choses ont été faites par lui, mais sans lui a été fait le rien ». Nous retrouvons là exactement le chaos primitif existant sans Dieu, c’est-à-dire avant que Dieu organise le Cosmos et y crée toutes choses, c’est-à-dire organise le chaos primitif. La contusion par Huesca entre le Diable qui est actif, avec le néant, indique bien que ce néant dont il est l’âme est le moindre être, le chaos. Antonio Orbe démontre que les manichéens (selon Augustin) donnaient à nihil (rien) le sens positif de chaos. Terra inanis de la Genèse et par suite de Diable.
Huesca l’atteste des cathares qui entendent, comme les manichéens, par nihil une « substance corporelle, incorporelle et toutes les créations visibles ».
Selon les concorrèziens et la Cène Secrète de Bulgarie, Satan descendant dans le feu inférieur y est rempli de malice, c’est bien là dans ce chaos et c’est de lui que se manifeste le mal. Il est nettement inexact d’attribuer aux « Albanais » et à Jean de Luggio, l’idée du monde actuel comme néant absolu, alors qu’ils le caractérisent comme un mélange fait de la matière préexistante, (Chapitre De la Création : créer ou faire comme à partir d’une matière préexistante).
Le caractère transitoire du monde visible qui est mêlé de bien et de mal, ne signifie pas qu’il soit tout à lait illusoire et tout à lait « en dehors de la substance divine ». Le temps, la matière, des milieux anéantis, temps-éternité, être-néant, sont des expressions abstraites d’un dualisme absolu, irréel, alors que le monde entier a été formé et se transforme dans le temps, sous divers états de la matière, la deuxième création, selon J. de Lugio, étant précisément la transformation des mauvais en bons.
Les anciens disaient, et Plutarque particulièrement, que « l’âme du monde causant les mouvements mesurables et ordonnés du devenu est le temps même». Selon une formule célèbre : « Le temps est l’image mobile de l’éternité ». Le devenir du monde se déroule dans une éternité relative, c’est-à-dire dans de grands cycles de temps. Les Nouveaux cieux et la Nouvelle Terre des cathares seront dans un cycle, dans une période du Temps,

Il est abusif de prendre à la lettre le manque de charité comme néant absolu, alors qu’il s’agit d’un ensemble d’êtres. Le chapitre XIII du « Traité anonyme » déclare bien que le présent monde est néant en citant l’Apôtre Paul « Si je n’ai point de charité, je ne suis rien » (Cor. XIII, 2) mais les citations des Psaumes indiquent bien que les nations et les méchants sont rejetés vers le néant, et le chapitre XVI précise bien que « les rois et les peuples considérés comme mauvais sont descendus en enfer et assujettis a un dieu étranger ». Ils existent donc d’une certaine manière dans le monde où le bien est mêlé au mal, dans ce monde que le Traité anonyme lui-même décrit comme un mélange. Le lecteur qui verra ainsi sur ce point essentiel le catharisme dans la ligne du Manichéisme chrétien ne s’arrêtera pas à l’idée du mal absence de bien ou néant, qui vient de St Augustin. Il n’aura pas à accepter cette idée reconnue par Nelli comme Incompréhensible d’un néant cause du mal, d’un néant absolu qui agit. Il trouvera dans la philosophie platonicienne, sans abstractions à la Heidegger, que Satan agit en tant qu’être et que l’origine. le principe et le but du mal ne sont pas encore élucidés.
Nous avons déjà indiqué, à propos des « Écritures cathares » quel était le rôle du Christ. Ce n’est pas seulement une tâche d’enseignement que le Christ a remplie. Sans être de ce monde il agit dans le monde et c’est dans le lemps qu’il se sacrifie et remporte la victoire sur le mal en l’assumant. Les existentialistes n’ont aucun remède à l’angoisse, au sentiment de la destruction et à la crainte de la mort. Mais Nelli voit bien cependant avec Jean de Lugio dans la création du second degré… la « réfraction dans le temps de la toute puissance divine surmontant naturellement dans l’éternel l’inquiétude, l’instabilité du mauvais principe (p. 52). Précisons : Le Christ donne la foi en l’éternité dans le temps de sorte qu’en lui, dans le monde futur de la Jérusalem Céleste — et non dans une éternité abstraite —, le mal sera définitivement vaincu sous ses Formes de la souffrance tl de la mort.

La liberté

Nous iu- voyons jusqu’ici pas quel est le but, la raison d’être du mal consenti par Dieu. Nelli traitant de la liberté nous donne-t-il des réponses satisfaisantes avec la manière dont il conçoit le catharisme ? Il y a une différence entre le point de départ philosophique des bogomiles, de l’École cathare de Bulgarie, des concorrèziens et celui des Albanais et particulièrement celui de Jean de Lugio. Les premiers usant du mythe du péché originel commis par libre choix et expliquant ainsi la chute, loin que l’on puisse voir dans le libre arbitre la conséquence du péché : les seconds, partant directement de l’action des mauvaises entités qui ont subjugué l’homme. Pour tous l’épreuve du mal était surmontée par l’initiation à l’Esprit et au Christ qui les libéraient. M. Nelli a bien vu cela. Nous avons recherché la source de la première École chez les origénistes et celle de la seconde chez les manichéens dans notre étude « De Platon aux chrétiens cathares » (Cahiers d’Etudes cathares, 1963, IIe Série, N° 26). Ceci redresse l’idée que, s’écartant du dualisme radical, les Garatenses par exemple, l’auraient transformé « en une sorte de catholicisme purifié, spiritualisé… » p. 67), C’est le détachement de l’Unité suprême qui est, selon Origène, l’affirmation en Satan d’une volonté personnelle. Mais Lucifer, qui est séduit par les créations matérielles de Satan, donne aux âmes humaines l’impulsion de la liberté selon la prière de Bélibaste (p. 51) (Registre d’Inquisition de Jacques Pournler, T. II, pp. 461-462) qui est de l’École synthétique de Bosnie et du Midi de la France. L’âme humaine est ainsi engagée en ce monde dans le conflit du bien et du mal.
Il est constant que tous les cathares voyaient l’âme engagée dans la contrainte du péché, qu’elle ait été libre à l’origine ou qu’elle ne l’ait jamais été. Dans sa critique du libre arbitre ( Chap. VI ), J. de Lugio constate celte condition de l’homme, mais il fait un faux raisonnement quand, parlant d’un homme oui n’a jamais fait le bien, ne le fait pas et ne le fera jamais, il en tire que « la puissance du salut n’a jamais été en lui … Ce qui ne passe jamais à l’acte nous ne pouvons dire en bonne logique qu’il est de quelque manière en puissance ». Au contraire, la puissance qui n’est pas encore passée à l’acte peut se manifester dans l’avenir. On peut lire a ce sujet de Bergson : La pensée est le mouvant (p. 10 et suiv.) et surtout le chapitre III. p. 98 et suiv. sur le possible et le réel.
Qu’est-ce qui nous délivrera de notre servitude actuelle sinon la connaissance du bien et du mal ? « Vous connaîtrez la vérité et la vérité vous délivrera », a dit Jésus. Et cette vérité quelle est-elle ? On la trouve certainement par la connaissance de l’être et du moindre être (et non du néant qui n’est pas). Dans ses expériences l’âme, ignorante encore, ne fait pas le mal consciemment ; ce sont les épreuves qui l’éclalrent. Voilà le but du mal décrit par J. de Lugio par la troisième création, quand Dieu permet le mal, quand à cause de nos péchés, il ne peut l’empêcher … C’est la souffrance qui éveille dans la conscience la volonté du bien et voila le rôle du mal. C’est ensuite que le Christ purilie l’âme du mal i C’est la seconde création selon J. de Lugio qui change les mauvais en bons, grâce au secours de l’Esprit qui éclaire l’âme de l’initié, et à l’amour du Christ qui la pénètre.
Nous ne pouvons répondre sans cesse aux expressions de néant que Nelli reprend dans toutes ses pages contrairement au texte de J. de Lugio : Les ténèbres et le mal ont été créés à partir d’une réalité préexistante (p, 132 des Écritures cathares : Livre des deux principes).
On trouvera d’autres clartés, que dans les abstractions de Heidegger, dans l’ouvrage du Dr Büchenbacher : Nature et Esprit, Fondements d’une philosophie chrétienne ». « La science étudiait en tous les domaines l’ordre du Cosmos établi par des lois précises, mais la science de l’atome a découvert an domaine sans règles qui est celui du chaos primitil de la philosophie grecque. Le Cosmos et le chaos sont des pôles opposés de la Nature ».
« Un être n’est libre que lorsqu’il se détermine pat ses propres lois (disons qu’il est autonome). Le moi n’est là d’abord que par la nécessité de son être (la loi de son être) ».
Mais précisément un véritable moi maître de ses propres lois doit pouvoir les nier, les réduire à l’état de chaos. « S’il agit d’une manière antinaturelle, antispirituelle, d’une manière qui n’est pas juste, il crée un mal ». Mais l’homme qui a succombe au mai pour être libre et ne l’est pas en ce sens, peut, grâce a la connaissance de l’Esprit et l’aide du Christ, « fortifier le bien présent en lui d’une manière naturelle et conquérir en Christ un degré supérieure de son être »… Il doit transformer ce chaos où il est tombé en un ordre, un Cosmos nouveau.
Le Dr Büchenbacher écrit aussi : « Le tragique de la manière de philosopher de Heidegger est qu’il ne peut pas trouver la voie de l’individualité (eigenlichen), c’est-à-dire du Moi saisi en soi » … « Ses descriptions ne touchent que le Moi de la conscience habituelle ». Or, « le Moi supérieur peut dans la transformation du Moi inférieur, dans sa positivité (faktizitat) qui certes n’est pas libre, œuvrer en liberté et se développer en être spirituel ». C’est précisément de cette transformation de l’existant pour la vie et non pour la mort que le Consolament des cathares était le symbole. M. Nelli arrive d’ailleurs à dire des âmes humaines « instruites qu’elles sont à la fin par l’expérience du mal et du malheur, elles adhèrent alors à Dieu »… (p. 55).
Cependant, quand il traite de l’eschatologie, il est dans un singulier embarras. D’abord la fin d’un temps, c’est-à-dire d’un cycle d’évolution prédit par l’Apocalypse et décrit par la Cène secrète ne s’oppose pas au salut de toutes les âmes dans une dernière période de l’évolution. Pourquoi le drame humain s’est-il déroulé dans le temps historiquement ?… C’est que les deux nouveaux et la Nouvelle Terre seront des réalités concrètes dans le temps et non le résultat  d’une transformation et non d’une substitution. Si l’œuvre de Dieu ne peut se parfaire « qu’après le drame satanique et en fonction de lui » et si la Bible elle-même étale l’œuvre de Dieu dans le temps sur sept jours (p. 62 et note 39), c’est qu’il s’agit de périodes d’évolution dans le temps.
L’embarras  de  Nelli  vient  de l’opposition abstraite du temps et de l’éternité dans laquelle il s’est enfoncé et qui l’amène à penser que « l’âme à la fois perdue, sacrifiée et sauvée dans l’éternité, se prête à cette feinte historicité, expression de sa propre ignorance et du peu de réalité de Satan ». Avec l’historicité du monde », nous voilà en plein mirage satanique ! Mais nous voyons maintenant que prendre le nihil, le néant, dans un sens absolu n’amène qu’a la confusion et au chaos dans l’interprétation même des doctrines cathares. Retenons que, dans le mélange qui constitue ce monde, le chaos, qui n’est pas néant absolu entre dans l’existence de l’être et abordons la question capitale de l’origine du mal, à propos de la conclusion de Nelli (page 70, note 44).

Écritures cathares

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Écritures cathares – René Nelli

Quatrième de couverture

Cet ouvrage avait été voulu, conçu et réalisé par René Nelli dès 1959, dans le but très clairement défini d’offrir au lecteur sous une forme accessible — c’est-à-dire en traduction française — mais avec un souci permanent de rigueur historique et d’intelligence critique, l’ensemble des textes originaux écrits par les cathares, qui datent des XIe – XIVe siècles. On trouvera ici une réédition actualisée et complétée des textes nouvellement retrouvés.
Écritures cathares se compose d’un apocryphe bogomile (l’Interrogatio Johanis ou Cène secrète), de deux traités (Traité anonyme et Livre des deux principes), de trois rituels (rituel latin de Florence, rituels occitans de Lyon et Dublin), textes présentés, traduits et commentés par René nelli (avec une introduction sur les origines et l’esprit du catharisme) — sauf le rituel de Dublin traduit et commenté par Anne Brenon.
Ces écrits cathares rectifient avec infiniment de précision et de sensibilité, la vision parfois à l’emporte-pièce des inquisiteurs, qui fut longtemps la seule source documentaire à disposition des chercheurs. Ils complètent heureusement l’information là où béait une lacune, réorientent bien des perspectives qui paraissent déroutantes. Décrit et décrié comme hérésie manichéenne par la polémique catholique médiévale, le catharisme se définit comme exigence chrétienne, et des plus hautes, dans ses propres livres.
Le livre des Cathares pour des lecteurs d’aujourd’hui.

Sommaire

Les liens vous permettent de lire mes analyses de ces textes. Pur les chercheurs désirant avoir les textes, les notes et les commentaires des auteurs, il faut demander le pdf correspondant.

  • Introduction – pdf disponible
  • La cène secrète ou interrogatio Johannis – pdf disponible
  • Le livre des deux principes (de duobus principiis) – pdf disponible
  • Traité cathare anonyme – pdf disponible
  • Le rituel cathare (Nouveau Testament occitan) – pdf disponible
  • Le rituel de Dublin – pdf disponible
  • Annexes : Paroles cathares – pdf disponible

Informations techniques

  • Broché (collé): 352 pages
  • Editeur : Édition Denoel – Paris (1959), Éditions Planète – Paris (1968), Éditions du Rocher – Monaco (1995) – Perpignan (2011)
  • Collection : Sciences humaines
  • ISBN-13 : 978-2268071664
  • Dimensions : 19,1 x 3,1 x 23,6 cm

N.B. : Les premières éditions ne contiennent pas le rituel de Dublin, ajouté par Anne Brenon à partir de l’édition de 1995.

Mon commentaire

Cet ouvrage regroupe l’ensemble des écrits authentiques des cathares qui ont échappé à la destruction.
Son caractère essentiel tient au fait que la raréfaction organisée des documents cathares rend plus important ceux qui nous sont parvenus.
Certes, ces textes sont d’inégale qualité et chacun tiendra l’un pour plus important que l’autre selon sa propre sensibilité. L’apocryphe bogomile n’étant pas de plume cathare peut paraître moins essentiel. Le Livre des deux principes et le traité anonyme de par leur nature volontairement polémique présentent un grand intérêt dans la connaissance de la doctrine cathare, mais ils émanent clairement d’un courant cathare particulier. Le Rituel de Dublin qui appartient à un autre courant est intéressant mais il pose de nombreuses questions relatives à sa date tardive qui est en porte-à-faux avec la nature de son contenu. En fait chacun se fera son idée et ce qui compte le plus est d’avoir cette matière à disposition.

Commentaire de Déodat Roché

Le premier ouvrage « Écritures cathares » qui met à la disposition du public la traduction de textes importants »est précédé d’une introduction que nous allons examiner. L’auteur se propose de « dégager la pensée philosophique et religieuse du Catharisme des interprétations trop étroitement historicistes — ou sociologiques — auxquelles elle est périodiquement soumise ».
Nous pouvons aujourd’hui distinguer avec plus de précision l’origine différente des deux courants principaux : l’un, celui de l’École de Bulgarie, venant par les bogomiles des origénistes et des manichéens, l’autre, celui de l’École d’Albanie, venant directement du manichéisme chrétien. Les deux Écoles se rejoignent par la philosophie platonicienne appliquée à l’explication des Écritures par la conception d’un dualisme radical et des deux facteurs ou organisateurs du monde des esprits et du monde des corps ; ce qui justifie l’appellation de néo-manichéisme. On a pu, à ce sujet, lire dans le fascicule n° 26 (Été 1965) des Cahiers d’Études cathares l’étude « De Platon aux chrétiens cathares par les origénistes et les manichéens ». L’École cathare de Bulgarie analogue au bogomilisme, n’a pas, avec sa Cène Secrète, une origine première manichéenne, mais en a fortement subi l’influence. Nous avons souvent montré que les dénominations de dualisme absolu et de dualisme mitigé sont superficielles. Les distinctions des thèmes qui seraient plutôt manichéens de ceux qui seraient gnostiques est faite par René Nelli en un résumé discutable à plusieurs points de vue que nous retrouverons par la suite à propos de l’esprit du catharisme.
L’Auteur veut ici donner « un rapide aperçu des tendances philosophiques essentielles du catharisme ». Dès la question de Dieu on sent l’intervention directe d’un point de vue philosophique qui lui fait considérer le mal comme néant, bien qu’il use aussi du terme plus correct de moindre être. Au sujet du mal, nous lisons d’abord que le mal est tout ce qui pousse vers le moindre être mais nous n’avons jamais lu nulle pari que les manichéens « avaient cru le trouver dans un existant infiniment anéanti la matière », D’ailleurs quand le manichéen Fauste de Milève (et non Fortunat) appelle l’autre principe matière, ou en un terme plus connu, démon, il s’agit d’une matière animée chaotique et non anéantie dans un sens absolu.
Le Principe du mal est bien distingué par les cathares de la matière « qui ne sautait être en elle-même absolument mauvaise». Satan aussi, « manifestation du mauvais principe ». ne peut être confondu avec lui mais qu’est-ce qui autorise à dire que les cathares croyaient à un mal absolu ? Il n’y a qu’un Absolu inconnaissable, ineffable, c’est le Père selon  l’expression chrétienne.
Il est vrai que les deux principes ne sont pas égaux, le mauvais ne se manifestant que dans le monde temporel actuel (visible ou occulte), mais il ne se manifeste que par des êtres qui, inspirés par lui, sont en décadence, alors qu’inspirés par le principe du bien, ils s’élèvent ou peuvent s’élever vers la perfection. Cependant l’action du bien et du mal, toute relative qu’elle soit, est positive et on ne peut dire, avec Nelli. que Dieu, selon les cathares, « doit attendre que le mal vienne expirer, de conséquences en conséquences, au bord de son éternité ».
Nous avons souvent démontré que la distinction d’un dualisme absolu et d’un dualisme mitigé est arbitraire et fausse. Elle vient des critiques de l’ancienne gnose par ses adversaires. (On peut lire en ce sens Amélineau : Essai sur le gnostidsme égvplien. Introduction). On ne peut dire sans explication que les « dualistes mitigés » n’admettaient qu’un seul « principe : le Dieu bon et qu’il y en a deux pour les autres : « Dieu et le Mal, c’est-à-dire : le néant». En réalité les premiers partaient du Dieu unique, Principe absolu, mais admettaient deux organisateurs — factores — l’un des esprits, l’autre des corps agissant selon la volonté du Père (d’après la Cène Secrète) ; alors que les seconds admettaient deux organisateurs (principes) analogues aux factores, mais ne concevaient l’action du mauvais qu’avec la permission du Dieu unique (Livre des deux principes).

Notons ici que ce n’est pas au commencement du Monde, « au début même de la manifestation », que se situe l’intrusion du mal (selon la Cène Secrète), mais au moment de la révolte mythique de Satan, antérieurement administrateur du Cosmos. On ne doit pas confondre l’intrusion du mal avec ce que Nelli appelle la contamination de l’être par le non-ètre et qui n’a été autre que la diminution de certains êtres vers le moindre être (et non le non-être absolu, aussi impensable que l’Être absolu). D’autre part quand Lucifer est en présence d’un  monstre, du  chaos, on  ne peut  parler d’un « principe  infiniment anéanti » ou d’une « négation  pure » ce chaos est une réalité matérielle et non une abstraction.
Les pages sur « La Liberté » étant corrigées et développées par Nelli dans « le phénomène cathare », nous en remettons l’examen au cours de l’analyse de cet ouvrage. Il est visible que la question du salut ne doit pas être séparée de celle du rôle du Christ, sans quoi on peut penser inexactement que, selon certains cathares, « il était absolument nécessaire » que les âmes, au cours des vies successives, se libèrent du mal et ajouter simplement que tout homme qui menait l’existence d’un parfait chrétien « n’était pas loin d’être sauvé ». Et encore que les simples croyants et les infidèles n’étant pas libres, devaient attendre que les épreuves les eussent pour ainsi dire transformés malgré eux. Ce serait méconnaître l’action salvatrice du Christ qui les libère.
Comment soutenir que Jésus-Christ a eu « dans le catharisme un rôle moins important que dans le catholicisme » en y voyant « une tendance nettement docétiste… à se représenter l’Incarnation comme ayant seulement une valeur symbolique ». Le sacrifice du Christ incarné est bien, comme pour les manichéens, le symbole du sacrifice de l’homme primordial, mais c’est l’ignorance de la nature du corps dans lequel s’est manifesté le Christ qui l’a fait prendre pour une apparence. Dans notre étude du fascicule n° 26 (Été 1965) de nos Cahiers : « De Platon aux chrétiens cathares par les origénistes et les manichéens », nous démontrons avec des textes gnostiques et cathares la réalité spirituelle et terrestre du corps du Christ. Mission d’enseignement du Christ, certes. mais son sacrifice réel était écrit dans la version cathare de la première Êpître de Jean (5-19) en des termes qu’on ne lit pas dans le texte de la Vulgate : « Jésus-Christ a souffert la passion, a été crucifié et est ressuscité pour nous ».

La morale cathare est vue trop exclusivement par Nelli dans le sens du renoncement au monde et pas assez dans celui de l’activité Chrétienne dans le monde. Ainsi il est vrai qu’avec Orlgène et Augustin, les cathares considéraient l’acte sexuel comme toujours mauvais par la concupiscence qu’il implique, mais Ils recommandaient aux croyants d’éviter la luxure dans « l’état de mariage » généralement consacré par le rite catholique, car ils avaient des femmes légitimes (uxores).
Enfin, c’est une grave erreur que de considérer l’Endura comme un suicide mystique et de dire en outre : « Il est hors de doute qu’elle était dans la logique de leur système moral ». Nous avons, dans notre réponse à Riol, établi que l’endura était un jeune limité et normal. Il n’est pas du tout « évident » que les cathares aienl souhaité d’être libérés pai la mort de tout contact avec le mal. Leur respecl de la vie que reconnaît Nelli et cet amour actif dans l’accomplissement des œuvres qu’il leur accorde aussi, permettra au lecteur attentif de discerner la vérité.
(Nous verrons ultérieurement ta traduction de la Cène Secrète el les notes pour essayer de présenter quelques solutions aux problèmes posés par les passages obscurs ou discutés.)i

Introduction au Livre des deux Principes

Nelli exposant les conceptions de Jean de Lugio note que « le principe du mal est en lui-même inconcevable ; il ne coïncide pas avec ses manifestations ». — Il est contradictoire, de voir en lui « le Père du diable » qui est un être et de conclure que le principe du mal « ne saurait être que le néant » considéré comme absolu. Erreur qui amènera l’Auteur à traduire Inexactement le Livre des deux principes (pages 127 et autres) penitus malus par absolument mauvais, au lieu de profondément mauvais, de traduire sans cesse vanissima, choses très vaines par toutes de néant, et de ne pas lire correctement le 3e verset, chapitre I du prologue de l’Evangile de Jean sans lui (le Verbe) a été fait le rien (qui est le chaos primitif, c’est-à-dire un rien relatif par rapport au monde qu’a organisé le Verbe).
Si on ne veut pas voir que les doctrines cathares s’expliquent par une philosophie platonicienne, on ne les comprendra pas : Des dieux inférieurs ont organisé le monde matériel. Lucifer et Satan étaient des organisateurs des corps. Ce sont, selon les cathares, des êtres spirituels qui sont puissants en tant qu’êtres (et non comme dérivant du mal), c’est-à-dire comme agissant sut l’impulsion du mal. Le Père du diable (Lucifer), c’est Satan et non le principe du mal considéré comme néant. Le mal est dans l’être ce qui est contraire à la nature de l’être disaient les manichéens selon Augustin.
Seuls des êtres agissent d’une manière plus ou moins parfaite et c’était, selon Manès, la direction et le résultat de leur action que nous considérons comme bons ou mauvais. C’est un dualisme dynamique. Parler d’existence d’emprunt pour la matière ne signifie rien, car la matière était préexistente, selon Jean de Lugio comme pour les manichéens, c’est-à-dire qu’à l’état de chaos elle existait avant la « création » du monde dans le sens d’organisation. C’est ensuite que l’âme vivante de cette matière agit d’une manière chaotique et résiste en partie à l’Ordre de l’Univers, mais elle n’est pas négation en soi.
Nelli se réfère au manichéisme et pense que Jean de Lugio a été amené à rationaliser les mythes manichéens N’est-il pas évident en ce sens que Satan n’a édifié le monde visible et formé les corps physiques qu’avec une matière qui est une réalité, du moins quant aux forces qui se manifestent en son apparence et non en presque rien (prope nihil). C’est le résidu des forces chaotiques qui s’oppose à l’Ordre de l’Univers et ce n’est pas un néant qui pourrait se changer « en limitation active ». Le combat des ténèbres contre la lumière, selon le manichéisme, est impliqué dans les premiers versets de l’Évangile de Jean. Les ténèbres viennent d’une réalité préexistente, elles sont « créées » ténèbres selon le Livre des deux principes indirectement el à partir d’une réalité préexistente (page 332 de la traduction). Noux expliquerons au sujet du Phénomène cathare la distinction traditionnelle à faire entre Dieu absolu et le Logos, le Verbe organisateur, qui n’exerce pas sa toute-puissance précisément pour nous laisser libres. C’est une véritable angoisse existentialiste que nous rencontrons déjà ici, celle du néant, celle de ce qui est « infiniment anéanti », celle d’une créature « gâtée » parce que « elle veut être ce qui n’est pas » ! De là Nelli  arrive à une opposition abstraite et  artificielle entre l’éternité et le temps, et aboutit à un point qu’il déclare obscur : « Pourquoi les âmes sauvées dans l’éternité ont-elles à se libérer dans l’histoire ? » historicité feinte ? mensonge satanique ? — Jamais les anciens philosophes n’ont pensé d’une manière abstraite. Pour les comprendre il faut revenir décidément à Platon ainsi que nous l’avons démontré par différents articles et que nous allons encore le faire par notre critique du « Phénomène cathare ». (Nous examinerons ensuite les traductions du Livre des deux principes et du Rituel ainsi que les notes dont elles sont assorties).